Dans la ville normande de Louviers, en France, la marque de luxe Hermès a ouvert un nouvel atelier de maroquinerie : la Maroquinerie de Louviers. Véritable joyau architectural qui préserve et s’intègre dans le paysage, cette nouvelle implantation dans la région conjugue l’esprit de transmission du savoir-faire exceptionnel de la maison et ses ambitions environnementales.
Construite sur une friche industrielle et d’une superficie de 6 200 mètres carrés, la Maroquinerie de Louviers se présente comme un imposant bâtiment minimaliste à ossature bois, dégageant au premier coup d’oeil une énergie créatrice et un sentiment de sérénité. C’est le 21e atelier de maroquinerie de la maison, et le seul en dehors de Paris à fabriquer des selles de cheval. Bien qu’elle ne représente qu’une petite partie du chiffre d’affaires de la société, la sellerie est au cœur de l’activité d’Hermès, et ce depuis la première moitié du XIXe siècle. Nous sommes au pôle historique normand d’Hermès, dans la petite commune de Louviers, dans le nord-ouest de la France, à une centaine de kilomètres de Paris.
Hermès a une longue histoire dans la région. Depuis plus d’un siècle, ce petit coin de France a joué un rôle crucial dans la croissance et le succès de la société. Ici, des artisans qualifiés ont consacré leur vie à la production des meilleurs articles de maroquinerie du monde, travaillant avec des techniques traditionnelles pour créer des produits intemporels et désirées par tous les passionnés d’équitation.
Dans la longue histoire d’Hermès, la Maroquinerie est la dernière réalisation d’une longue série de projets destinés à renforcer l’ancrage local de la maison et à préserver les traditions et la culture normandes. « Nous sommes fiers d’investir dans la région et de créer des emplois pour des artisans qualifiés qui partagent la passion de la marque pour l’excellence », explique un responsable. Opérationnel depuis janvier 2023, l’atelier compte déjà 170 artisans et devrait en accueillir jusqu’à 260 dans les prochaines années. Formés aux techniques traditionnelles, dont la couture à la main, au sein du centre d’apprentissage local, ils sont non seulement responsables de la fabrication des luxueux articles de maroquinerie qui ont fait la renommée d’Hermès, mais aussi de la préservation de leur savoir-faire unique pour les générations futures.
En parcourant le périmètre du bâtiment, il est difficile de ne pas être subjugué par sa symétrie épurée et sa beauté. Au fur et à mesure qu’il se dévoile, lentement et successivement, on peut saisir ses textures remarquables et, surtout, son équilibre générale. Avec une subtile touche industrielle, l’atelier a été conçu par l’architecte talentueuse et visionnaire Lina Ghotmeh. Née à Beyrouth et basée à Paris, où elle dirige son cabinet d’architecture éponyme, Lina Ghotmeh s’est fait un nom grâce à ses conceptions innovantes inspirées du patrimoine libanais et à son approche durable de l’architecture. L’un de ses projets les plus remarquables est le musée national estonien de Tartu, en Estonie, dont le design captivant évoque l’idée d’une « forêt chantante », grâce à son toit ondulant et à ses colonnes en forme d’arbre. Connue pour son utilisation de formes et de matériaux organiques, ainsi que pour sa capacité à intégrer de manière transparente la technologie dans ses projets, Mme Ghotmeh considère son travail comme une « archéologie du futur ». « Chacun de ses projets naît d’un processus de recherche approfondi, tire son esthétique de ses relations étroites avec la nature et exprime l’essence des matériaux à partir desquels il est façonné », explique notre guide.
Véritable prouesse technique, le bâtiment a un matériau emblématique : la brique. Pour sa construction, Ghotmeh en a utilisé plus de 500 000. Incroyables par leur durabilité, leur polyvalence et leur capacité à résister à toutes les conditions météorologiques, ce sont des matériaux de construction phénoménaux : durables, recyclables et dotés d’excellentes propriétés d’isolation thermique. Témoignant de l’ancrage local du projet, les briques utilisées pour la Maroquinerie proviennent de la région afin de minimiser l’impact de la construction, mais aussi de célébrer le savoir-faire et l’histoire de longue date des briquetiers normands. Les briques du bâtiment, qui constituent un point d’ancrage visuel clair pour le centre tout en s’intégrant harmonieusement, génèrent une palette fascinante de teintes rouges et violettes dont l’éclat et la texture changent au fil de la journée et des saisons, ce qui en fait un spectacle pour les yeux et le photographe de passage.
La fascinante méthode de narration de Ghotmeh est immédiatement perceptible dans l’apparence du bâtiment, qui reprend les motifs chers à la maison. La forme carrée de l’atelier rappelle le carré de soie d’Hermès, tandis que les arcs gracieux qui définissent le volume évoquent la trajectoire d’un cheval qui saute. Partout, des formes intemporelles et des lignes épurées rappellent la rigueur des artisans et leur main experte, ainsi que la recherche constante de la perfection et de l’excellence du travail du cuir. Le centre de l’atelier s’ouvre sur un espace d’accueil qui sert de lieu d’exposition. Dans ce cadre paisible et équilibré, l’artiste plasticien français Emmanuel Saulnier a installé une œuvre d’art captivante composée de sept aiguilles en acier inoxydable suspendues à des étrivières en cuir, fabriquées sur mesure par les bridonniers d’Hermès. Les nombreux ateliers qui entourent la cour de la manufacture se dévoilent au fur et à mesure de la déambulation. A l’intérieur de ces ateliers, l’atmosphère est à la concentration et au calme, les artisans travaillant avec diligence pour créer chaque pièce à la main, en utilisant les matériaux les plus fins et les techniques transmises de génération en génération. De la petite maroquinerie aux selles et aux brides, tout est réalisé avec le plus grand soin et la plus grande précision, y compris la création la plus célèbre d’Hermès, le « sac Birkin », l’un des sacs à main les plus convoités au monde.
« Au cœur de l’atelier se trouve un engagement en faveur de l’artisanat et de la qualité, ainsi que de la durabilité et des pratiques éthiques. De sa construction à son fonctionnement quotidien, tout a été conçu pour que le bâtiment englobe, prolonge et complète son environnement naturel », explique un des responsables de la maison. Conçu dans le respect des valeurs d’Hermès, le projet a été pensé de manière bioclimatique, en tirant pleinement parti de la lumière et de la ventilation naturelles pour limiter les besoins d’éclairage et de chauffage, et en mettant en œuvre la géothermie et les panneaux solaires pour assurer l’autonomie énergétique de la manufacture. « Nous avons mis en œuvre une série de pratiques écologiques pour minimiser l’impact sur l’environnement. Dès à présent, il produit plus d’énergie qu’il n’en consomme, et ce avec de faibles émissions de carbone », poursuit-elle.
« La Maroquinerie de Louviers incarne les ambitions de la maison en matière de développement durable, ainsi que son attachement aux belles choses et au bien-être de ses employés », ajoute-t-elle. Serein et lumineux, le complexe est décrit comme un « lieu de vie pour les artisans », un lieu qui stimule la croissance et dans lequel les créatifs peuvent construire des témoignages et acquérir des connaissances tout en partageant des histoires et des rires. Autour de lui, trois hectares de jardins ondulés avec des vallées douces et des bassins créés par l’architecte paysagiste belge Erik Dhont renforcent le sentiment omniprésent de sérénité, de communauté et d’harmonie avec la nature, tout en préservant la biodiversité et l’environnement locaux.
Sous les ombres rafraîchissantes des arbres, la Maroquinerie de Louviers se déploie pleinement comme un témoignage du pouvoir de l’architecture à créer des espaces qui non seulement fonctionnent bien, mais aussi inspirent et élèvent ceux qui les habitent. Depuis 1837, Hermès reste fidèle à son modèle artisanal et à ses valeurs humanistes qui célèbrent le savoir-faire d’excellence, la liberté de créer et l’esprit d’innovation. Confirmant le savoir-faire de la maison, l’atelier normand souligne l’engagement de la maison à contribuer durablement au développement régional, à repousser les limites du possible en matière de produits et de productions, tout en restant fidèle à ses traditions patrimoniales. Le bâtiment de Ghotmeh est plus qu’une simple illustration de cette volonté, c’est un modèle à suivre pour les autres entreprises du secteur.